Dossier sur l’entraide familiale

L’entraide familiale en entreprise peut être assimilée à du travail dissimulé

La Lutte Contre le Travail dissimulé fait partie des missions essentielles des Urssaf.

Elle a notamment pour objet de mettre un terme à la concurrence déloyale entre professionnels, de préserver les droits des salariés et de favoriser l’optimisation des prélèvements sociaux pour garantir le financement de la Sécurité sociale.

Le recours à l’entraide familiale dans le cadre professionnel, est considéré comme de la dissimulation de salariés et en aucun cas comme une contribution au développement d’une activité professionnelle.

Les personnes qui exercent une activité au sein d’une société ou d’une entreprise commerciale doivent avoir le statut de salarié dans les conditions de droit commun (à l’exception du gérant et des associés majoritaires), et non de bénévole.

En effet, est considéré comme bénévole, celui qui apporte un concours spontané et désintéressé, en dehors de ses activités ordinaires, au profit d’une association sans but lucratif. Il participe alors de son plein gré à l’animation et au fonctionnement, sans contrepartie financière et sans attribution d’avantages en nature.

La dissimulation de personnel salarié peut être lourde de conséquences. Si l’employeur s’est soustrait intentionnellement à son obligation d’effectuer une DPAE (Déclaration Préalable à l’Embauche) ou s’il n’a pas fourni de bulletin de salaire à son ou ses salariés, le redressement est fixé de manière forfaitaire. Il devra s’acquitter d’au moins 6 fois le SMIC. Il est important de rappeler que la DPAE peut être faite par courrier, fax ou sur internet (www.due.urssaf.fr).

Contrat de travail : entraide familiale (21/04/2011)

Source : http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-91446QE.htm

Question n° 91446 de M. Jacques Remiller (député Union pour un Mouvement Populaire de l’Isère)

M. Jacques REMILLER appelle l’attention de M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur la différenciation entre travail dissimulé et entraide familiale, notamment dans les entreprises familiales. En effet, les organismes de contrôle (URSSAF, MSA…) sont fréquemment amenés à prononcer des sanctions pour travail dissimulé alors que l’exploitant pensait pouvoir recourir à l’aide de parents proches ou de son épouse lorsque celle-ci, employée à temps plein en dehors de l’entreprise, n’a pas adopté le statut de conjoint collaborateur.

L’interprétation subjective des faits par les contrôleurs semble laisser les entrepreneurs dans une certaine insécurité juridique lorsqu’ils ont recours à l’entraide familiale pour des tâches occasionnelles ou ponctuelles, comme par exemple, dans le secteur viticole où la période des vendanges est propice à l’entraide bénévole entre membres de la famille.

En conséquence, il lui demande de bien vouloir préciser les conditions dans lesquelles le recours à l’entraide pour des tâches exceptionnelles et occasionnelles est toléré, ainsi que les situations dans lesquelles la constitution d’un contrat de travail est obligatoire.

Réponse du Ministère du Travail, de l’emploi et de la santé publiée au JO le 12/04/2011 p. 3743

Le ministre du travail, de l’emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative à l’entraide familiale pour des tâches occasionnelles et ponctuelles, notamment dans le secteur viticole lors des périodes de vendange.

L’entraide familiale est très répandue dans les petites entreprises familiales, dans lesquelles le chef d’entreprise recourt aux membres de sa famille pour des prestations gratuites de travail ou de service. L’entraide se caractérise par une aide ou une assistance solidaire effectuée de manière occasionnelle et spontanée, en dehors de toute rémunération et de toute contrainte. Lorsqu’elle est réalisée dans un cadre familial, l’entraide se limite au cercle familial proche (ascendants, descendants, conjoint, etc.).

Pour autant, les liens de parenté ne sont pas incompatibles avec l’existence d’un contrat de travail. En effet, l’aide apportée ne doit être ni durable ou régulière, ni accomplie dans un état de subordination, ni se substituer à un poste de travail nécessaire au fonctionnement normal d’une entreprise ou d’une activité professionnelle. Les tribunaux ont ainsi considéré que le recours par un exploitant de débit de boissons à son fils et à la compagne de celui-ci excédait la notion d’entraide familiale et caractérisait une situation d’emploi salarié non déclaré (Cass. Crim., 21 mars 2000, X n° 99-85105). Il en va de même s’agissant d’un exploitant d’un café-tabac ayant sollicité sa fille pour le service de la clientèle (Cass. Crim., 3 juillet 1996, X n° 95-81288). De même, l’emploi de ses enfants mineurs pour l’ouverture d’un magasin d’articles divers le dimanche par un gérant n’a pas été admis comme relevant de l’entraide familiale (Cour d’appel d’Angers, 28 septembre 1994, X).

Ainsi, si les relations entre les membres d’une même famille peuvent justifier une aide spontanée, désintéressée et libre, cette prestation de travail ou de service peut cependant, selon les conditions de son accomplissement, établir l’existence d’un contrat de travail dès lors que les critères du salariat, déterminés par le juge, sont réunis. C’est notamment le cas lorsqu’un lien de subordination caractérise la relation entre un travailleur et un employeur (Cass. Soc., 13 novembre 1996, Société Générale URSSAF de Haute-Garonne). Ces dispositions ont été rappelées dans une lettre circulaire de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale du 24 juillet 2003.

Bénévolat au sein de l’entreprise, entraide familiale : attention à la requalification en contrat de travail

L’entraide familiale est très répandue dans les petites entreprises, les entreprises familiales ou au cours de la création d’une entreprise. L’entraide familiale en tant que « prestation gratuite de travail » est en principe indifférente à la notion de contrat de travail, mais il peut arriver que la personne qui a effectué le travail conteste l’avoir fait bénévolement c’est-à-dire gratuitement et cherche à se voir reconnaître un véritable contrat de travail.

Pour qualifier la nature des liens qui unissent l’entreprise et la personne ayant effectué la prestation, les tribunaux apprécient ce lien en tenant compte des conditions dans lesquelles la prestation a été effectuée par la personne et non par la qualification que les parties avaient donné a leur relation au départ.
A noter que le contrat de travail peut être reconnu même en l’absence d’écrit.

LES CRITERES DE L’ENTRAIDE FAMILIALE

Critères déterminant l’existence d’un contrat de travail

Le contrat de travail, qui permet de délimiter l’entraide bénévole du salariat, n’est pas défini par la loi mais les tribunaux en ont dégagé trois critères qualifiant l’existence d’un contrat de travail.

La prestation de travail

Le contrat de travail suppose nécessairement l’existence d’une prestation de travail.
Si aucune prestation de travail n’est fournie, il ne peut pas y avoir de contrat de travail.

La rémunération

La rémunération n’est pas un critère suffisant à elle seule pour déterminer l’existence d’un contrat de travail mais c’est elle qui permet de faire la distinction entre bénévolat, entraide familiale et contrat de travail.

Pour en donner une brève définition, il s’agit de la contrepartie donné à de la prestation de travail ; elle peut être versée en argent ou en nature, ce qui signifie qu’elle n’est pas forcement d’ordre financier.

Le lien de subordination

Les tribunaux ont déterminé que « le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ».

C’est un critère déterminant dans la relation de travail pour définir le contrat de travail.

Les critères retenus pour écarter la notion de contrat de travail

  • Les « coups de main » occasionnels justifiés par des liens d’amitié ou par une participation financière dans l’affaire.
  • L’indépendance dans le travail de la personne qui aide.

  • Le non-remplacement de la personne en son absence.

ENTRAIDE FAMILIALE ET SECURITE SOCIALE

« Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d’une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l’un ou de l’autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat ».

En matière d’assujettissement obligatoire à la sécurité sociale, les tribunaux retiennent pratiquement les mêmes critères que ceux exposés précédemment, à savoir :

  • Durée du travail : l’assujettissement peut découler d’un travail accidentel, occasionnel ou de faible importance, car aucune durée minimum de travail n’est prévue par le texte pour être assujetti.
  • Existence d’un lien de subordination,
  • Rémunération : le montant, la nature, la qualification de la rémunération sont indifférents.

Seule la participation aux pertes de l’entreprise exclura d’emblée le caractère salarial de l’activité déployée ; elle pourra être par ailleurs un indice permettant d’établir qu’il existe alors une société de fait.

Si les tribunaux reconnaissent qu’il y a contrat de travail, alors des cotisations sociales devront être payées en conséquence.

ENTRAIDE FAMILIALE ET PROBLEME DE RESPONSABILITE CIVILE

Le bénévolat réel n’est pas, sauf clause expresse contraire, couvert par la responsabilité civile d’exploitation de l’entreprise.
C’est donc le bénévole qui doit réparer le dommage qu’il aura éventuellement causé à l’occasion de l’entraide au sein de l’entreprise.
Par contre, si la relation était requalifiée en contrat de travail, par rapport aux critères énoncés ci-dessus notamment le critère de la subordination, la responsabilité civile incombera à l’employeur.

Précision : Les liens de parenté ou d’amitié ne sont pas incompatibles avec l’existence d’un contrat de travail, à partir du moment où la collaboration répond aux critères d’un contrat de travail.